Sur la table écornée par les années vivantes
Où ont dansé ensemble assiettes et poings levés
Une poussière vieille a envahi d'amiante
Et parsemé d'ennui sa surface abîmée
Un sofa creux et las fait face au mur épais
Recouvert du drap blanc que vêtent les fantômes
A ses pieds engourdis la table basse émet
Des sons de porcelaines et des souffles d'arômes
D'anciens chocolats chauds, des soupes, des tisanes
A la fenêtre fine et fissurée de temps
Bat un volet cassé, tape comme une canne
Sur le silence en bois dont il est l'abattant
La cheminée de pierre en suie de craies et cendres
Figée comme une stèle au cimetière-abri
Des souvenirs filants sur de tristes bélandres
Au large du lointain qu'est devenu la vie
Dans la chambre au premier gît la frêle carcasse
Du lit des beaux amours dont on fit des étreintes
Le matelas fourbu qui a connu des plaintes
Est dévoré de mites et zébré de crevasses
Et dans l'alcôve usée la petite masure
Qui fut salle des bains semble avoir rétréci
Ses ciments époudrés, ses joints de moisissures
Le lavabo plus sec qu'un désert de Libye
Dans le jardin perdu aux enfers de sa jungle
Sur des toiles tendues comme des œuvres d'art
Des araignées plus veuves que toi s'y épinglent
Le soleil tisserand coud de l'or aux fils noirs
Et j'hérite en pleurant du charnier qu'il faut vendre
Le cœur empli de malles qui sont des trésors
A offrir à mon nom comme d'autres à prendre
A emporter ailleurs où les jours sont encore.
Écrit par Edelphe
Le monde extérieur est vaste, terrifiant, lunaire, impropre et merveilleux, violent et plein d'amour.
Le monde intérieur est bien plus encore... Catégorie : Divers
Publié le 29/10/2021
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J’ai bien aimé la de scription de cette maison vide Enfin...pas si vide que ça finalement. Elle est même plutôt pleine et débordante si j’en crois l’auteure. J’ai été transportée dans une maison qui fut mienne. Merci. |
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Iloamys |
Fine de scription et pesante, on sent le poids des temps vécus, les deux dernières strophes sont comme un univers camouflé par les mots d'une vieille chanson. "A emporter ailleurs où les jours sont encore" Ce vers me fait penser à celui d'un poème d'Aragon "Sortir nu dans la pluie et craindre le beau temps" Mais il y a toujours ce brin de lumière en vous Merci pour ce poème Edelphe |
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Oshidiriz |
"Au large du lointain qu'est devenue la vie" ... Ce vers sublime est un sommet (un, mais pas le seul) de ce poème qui semble nous proposer un lieu idéal pour fêter Halloween ... La dernière strophe nous décille et rejoint ce à quoi j'ai souvent songé : Si ma famille disparaissait d'un coup dans un accident de voiture par exemple, j'hériterais alors de leur maison pleine et archi-pleine d'un bazar dont la seule évocation m'effraie. Bravo pour votre écriture puissante aux expressions riches. Vous possédez de surcroît l'art consommé de la de scription des lieux et de leur état dont Balzac par exemple eût pu se reconnaître ! |
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Ombrefeuille |
Scènes figées qui restent d'existences terminées, le sentiment que l'on peut éprouver à la vue d'une maison vide de toute vie est exprimé avec une intensité prenante. Se trouver confronté à cette réalité, lorsqu'il faut trier et vider les affaires d'êtres chers récemment décédés, est une étape éprouvante du deuil. J'ai également apprécié "L'affliction", intensité poétique née d'un contexte sombre, beauté issue de la tourmente intérieure. Merci pour ces partages d'une grande puissance d'expression. |
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Matriochka |
J'aime ton poème ! | |
CRO-MAGNON |
bonjour Edelphe tes mots sont une de scription déchirante de ces lieux "abandonnés" tu à su percer l'âme de la maison "défraichie" mais te rappelle d'heureux moments à coup sûr! j'ai apprécié ! en favori ! bonne journée ! amitiés romantiques :) |
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romantique |
Quel talent ! C'est superbe. Merci pour cet étrange voyage dans un monde parallèle. Bravo ! |
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virgile |
Très beau poème triste !!! La maison vide est emplie encore de son ancienne vie... Bravo ! |
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Lucyline |
Bonsoir, BRAVO !!! Comme ça prend aux Tripes .. Vide mais pleine de Souvenirs, de Présence absente certes, et de tout Objets qui ont l'Histoire en leur Ame et prêts à nous chuchoter la moindre Miette de tant d'Années .. LyS .. |
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Lys-Clea |
La 4ème est épatante. Le titre, comme une chanson, désigne une vacuité qui est apparente, mais la maison ainsi que témoigne le poème bourdonne encore et encore d'un plein de sensations. J'aime ! | |
jacou |
C'est superbe, et on se promène dans cette maison pleine de traces de vies. Elle devient éternelle par vos mots. "Le soleil tisserand coud de l'or aux fils noirs ", j ai beaucoup aimé. | |
Eleidora |
Un immense merci pour ces nombreux commentaires si bienveillants Ils illuminent ma journée |
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Edelphe |
Ce poème est magnifique il m'a bouleversée. Vous avez une écriture hors du commun. Vous employez les mots avec une grande justesse ils font vibrer et chavirer les âmes. Bon dimanche à vous | |
roserose |
Merci beaucoup Roserose | |
Edelphe |
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