Tu ressembles à une figurine qu'on aurait placé en vitrine
joujou sorti de l'emballage, exhibé, vendu avant l'âge
t'es jauni comme un vieil objet, mannequin au charme désuet
t'es un genre de poupée "Bella" changée en "marie couche toi là"
Autrefois quand t'étais enfant tu rêvassais en t'endormant
à l'héroïne de Perrault, vétue d'une cape coquelicot
mais tu sais le chaperon rouge jamais ne vécut dans un bouge
et puis contrairement à toi le loup elle ne l'a vu qu'une fois
Car chaque soir dans la ruelle tu tapines entre les poubelles
tu minaudes, tu fais la belle comme au temps ou t'étais pucelle
même si t'es plus qu'une vieille morue, une épave, une fille des rues
t'as gardé ton air ingénu d'ange sans aile tombé des nues
Parfois quand tu te tapes un rail, tu entends hurler la ferraille
et tu vois des locomotives qui t'emmènent vers d'autres rives
vers des pays hermaphrodites loin de tous ces hommes qui t'habitent
qui violent ton esprit et ton corps sans sorte aucune de remord
T'as des valises sous les paupières qui te mèneront jamais voir la mer
à l'intérieur t'as bien rangé les voyages qu't'as imaginé
tes soleils, tes plages tes tropiques, tes îles perdues dans l'atlantique
et parfois quand se ferment tes yeux t'accoste dans le merveilleux
Et chaque soir dans la ruelle le vent du large t'interpelle
il vient faire briller tes prunelles , te souffle des rêves démentiels
pour un temps tu quittes la rue tu décolles direction les nues
tu retrouves tes ailes d'ange déchu pour joindre tes paradis perdus
Tu remontes tes bas filés comme ta jeunesse qui s'est taillée
t'es qu'une putain sur le retour, une gueule cassée de l'amour
même si tes tranchées sont de soie chaque passe demeure un combat
une lutte constante pour supporter le dégoût, la honte, les regrets
Chez toi t'as enlevé les miroirs, tu supportais plus de te voir
tu préféres t'imaginer belle et fraîche comme par le passé
une fleur éclose sous la rosée que la nuit a trop vite fanée
avec les atteintes du temps et les outrages de tes amants
Mais chaque soir dans la ruelle malgré tout je te trouve belle
j'vois encore briller l'étincelle comme au temps où t'étais pucelle
et même si la vie t'a déçu t'as gardé ton air ingénu
et si l'paradis t'y crois plus t'aimerais encore monter aux nues
T'as jamais choppé le SIDA car même l'enfer ne veut pas d'toi
ton enfer à toi est ici, il a la chaleur du mépris
du fric posé à la va vite sur ton chevet avant la fuite
de ces chiens qui partent la queue basse quand sur toi ils ont fait main basse
Tant de cons t'ont promis la lune, un anneau , un toit, la fortune
avant de rentrer en rampant près de leur femme et leurs enfants
alors maintenant les princes charmants tu les laisses venir en miaulant
tu ronronnes sous leurs caresses mais t'es loin d'eux quand t'ouvre tes fesses
Et chaque soir dans la ruelle tu pries pour que la mort t'appelle
tu crêves d'envie d'monter au ciel plutôt qu'de vendre ton septième ciel
avec ta tronche d'ange déchu tu rêves de paradis perdus
couvrir d'un linceul ton corps nu et goûter au repos des nues.
Écrit par Marc Renton
On t avait dit que tout se paye, regarde bien droit dans le soleil....
Catégorie : Divers
Publié le 20/04/2010
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C'est tellement bien écrit. Très émouvant poème. | |
SpookyVince |
merci, Spooky, thème récurrent, j'ai dû être une vieille prostituée dans une autre vie lol. | |
Marc Renton |
Je n'ai pas pu m'empêcher de trembler en pensant à tout ce que tu as dans la tronche, je les défends pas toujours ces filles il y en a des vicieuses qestions argent mais la je temble c'est la peur ma foi. | |
eric |