La nuit est sombre, le jeune homme quitte son logis
en salopette grise et tee-shirt bien trop grand
un gros sac en bandoulière lui bat le flanc
il contient des biscuits et puis quelques habits
une veste plus chaude car l'hiver se rapproche
et des économies tenant dans une poche
quelques dizaines de dollars, il verra après.

Pas de lettre d'adieu, l'impulsion du moment
tout juste dépêtré de son adolescence
les cheveux en bataille et les yeux grands ouverts
il quitte la maison de son père, le port fier,
d'une démarche sûre qui fait comme une danse
là, dans l'air bleuté de la nuit qui l'enveloppe
et dans lequel il fille droit vers la voie ferrée.
Un train de marchandises vers lequel il galope
lui offre un wagon vide plein de paille séchée.

Il croise la station-service du vieux Billy
éclairée de néons au plus fort de la nuit
le vieux est insomniaque et chasse les bandits
le jeune y a bossé certains après-midis
le vieux lui racontait ses combats de la vie
le jeune l'écoutait d'une oreille distante
mais il se sentait bien dans les vapeurs d'essence.

Bien vite le roulis du train, l'odeur du foin
le font dodeliner du chef et puis des reins
il finit par tomber, la tête entre les mains
allongé au sol dur, dormant comme en son lit.
Demain il fera jour, peut-être même soleil
la route est devant lui, la ville sans pareille
il trouvera fortune au détour d'une ruelle
et peut-être l'amour dans les bras d'une belle.

Demain il fera jour...