Dimanche sonne à l'église.
C'est un petit pavillon de banlieue
Un coin tranquille en France profonde
Le poulet rôti trône au milieu de la table
Bien doré, brillant d'huile et de beurre
Les pommes de terres sautées font de l'œil aux convives
La fenêtre est ouverte pour la fumée du four
Les assiettes du dimanche joliment disposées
Le vin rouge est servi dans les six verres à pied
Qu'on tient, très délicat, le petit doigt en l'air.
Il faudra le boire jusqu'à la lie.
Trois quarts d'heure plus tard et quelques verres de vin
On est moins policé, puisqu'on est entre nous
On va dire ce qu'on pense
Après tout
L'oncle, très sûr de lui, certain qu'on le plaindra
Raconte tout à trac son infirmière bougnoule :
J'ai refusé qu'elle me touche
Moi, les gris
Fallait voir en Algérie
La tante, plus modérée, est là pour apaiser
Très calme, raisonnable et d'un air entendu :
C'est vrai qu'avec le chômage qu'il y a partout
Il faut d'abord donner du travail aux français
Quand même, nous prend-t-elle à témoins
On ne peut pas aider la terre entière
Dit-elle en s'essuyant sur sa serviette made in Taiwan
Pourtant, mon ostéopathe est un marocain
Mais il est très bien
Vous reprendrez bien un peu de patates
Dommage, le dernier hold-up est le fait de vrais français
On ne peut pas ramener ça sur le tapis
On va même passer l'anecdote sous silence
On est là pour critiquer ces fameux étrangers
Pas les nôtres.
Parce qu'on a beau dire, reprend le brave oncle
Chaque fois qu'il y a du ramdam
Comme par hasard, c'est des bougnoules !
Mais le couplet est réchauffé
Il faut trouver bien pire.
Heureusement, il y a les roms
Blottis en terrain vague à côté de l'autoroute
L'oncle est tout content de l'aubaine :
J' te f'rai une descente là-dedans moi,
Tu verrais qu' ça f'rait du vide !
La tante, toujours aussi posée :
C'est vrai quand même, c'est insalubre ces campements
On n 'peut pas garder tout ça chez nous
Ils ne font pas d'effort, faut dire c' qui est
Ils ne font rien pour s'intégrer.
Moi, habitante de la terre bien avant que d'être française
J'ai déjà entendu cela
D'autres bien avant moi en furent les témoins
D'autres refrains, d'autres époques
Les vieux eux-mêmes l'on vécu
Et pourtant
Je ne dis rien, ils sont très vieux
Heureusement pour moi que ma peau est bien blanche
Même si je n'ai rien fait pour ça.
Le poulet trop gras me reste sur l'estomac
Quand arrive la tarte aux pommes dans son plat en argent
Je n'ai plus faim.
Écrit par Marouette
On ne sait pas souvent ce que l'on sème,
on ne sait pas souvent combien l'on aime, rien ne nous prépare à marcher dans le sens de la terre. Catégorie : Triste
Publié le 10/10/2013
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Le racisme et la xénophobie ordinaires des "braves gens" décrits avec talent. Marouette, je vous applaudis! | |
Mokolo |
J'ai lu, vous imaginez ce pertinent pamphlet, plus que poème et je ne peux qu'admirer votre générosité, cependant je dirais à la décharge des racistes xénophobes ou intolérants que certains de mes compatriotes ou coreligionnaires ont parfois contribué par un certain comportement à ce rejet de l'étranger. Je veux parler de ces jeunes que le chômage ou la facilité poussent au trafic de drogue, et à l'incivilité. La provocation est dans la nature arabe et elle est mal perçue, ces jeunes disent vous nous rejetez, vous nous enfermez dans des ghettos, donc, nous avons nos propres lois, et refusons celles de votre république. Ce sont à quelques exceptions près, des français, beurs et beurettes comme on les appelle en France. Pourtant sur les quelques milliers d'étrangers en France la plupart sont bien intégrés. et l'on assiste à la mixité des unions. Dans le sud m'a-t-on dit la plupart des ouvriers agricoles sont issus du Maghreb ! L'intolérance est issue de la démagogie, hurler avec les loups, la peste, c'est la misère, ce mal qui répand la terreur. Les fléaux ? l'ultranationalisme et l'islamisme. Non l'islam ni le patriotisme, encore une fois merci d'avoir écrit ce texte courageux dont je le répète la générosité vous honore, vous souhaite un e excellente journée. | |
Abdel |
J'approuve totalement cet écrit, cela m'insupporte tout autant le racisme, écrit d'une bien fine manière, j'aime les écrits engagés, merci, amitié poétique, absolème | |
absolème |