Dans les pupilles de Camille,
Suinte la déchirure d'un abandon;
Celui d'une ingrate famille,
Qui n'a su percevoir tous ses dons.
Brille l'éclat d'une jeunesse,
Jusqu'aux ternissures des couloirs,
Le cri désespéré d'une déesse,
Aux portes d'un immense défouloir.
Le bruit du fer sale et rouillé,
Et l'odeur du textile comme humide,
Furent son quotidien verrouillé
Par les pennes d'un ordre insipide.
Dans les pupilles de Camille,
L'extase du corps comme pétrifié,
S'expose, se tord et brille,
L'admirable ceint, comme statufié.
De longs cris qu'elle ignore,
Parce que rien ne lui est familier,
Faut-il qu'elle les implore,
Ces gens munis de longs tabliers ?
Et les couleurs se déposent
Sur la toile tout juste immaculée,
Comme elle décrit l'apothéose,
Là où nul ne l'a fait reculer !
Dans les pupilles de Camille,
La blessure d'un mensonge se voit,
Voguent les cieux qui brillent,
Elle, demeure triste et sans voix !
Elle, qui semble si éteinte,
Alors qu'aucune missive ne vient,
Dans l'art berce l'étreinte,
D'un être dur qui hurle un revient !
Et déjà les lourds trousseaux,
Pendent aux mains des gens de tâche;
Faut-il que rien ne se sache,
Seulement le fin sillon du pinceau ?
Et sa plume s'épuise, ô peine,
Une admirable écriture dans la nuit,
Déjà s'élève au-dessus, et puis,
Ne retombent que de pauvres étrennes.
Ce n'est pas ce qu'elle désire !
Elle, que la folie n'a pas enserrée;
Il ne lui reste qu'à l'écrire,
Pourquoi ne vient-il pas la rassurer ?
Dans les pupilles de Camille,
Le génie caresse l'onde des éléments,
Sur lesquels son aura scintille,
Eternels sont ses illustres monuments.
Vous croyez l'avoir abandonnée,
Mais elle a sculpté sa seule existence,
Vous la conceviez irraisonnée,
Mais elle créa de si belles stances !
Au seuil d'une folie sans nom;
Indéfinissable comme l'ombre humaine,
N'oubliez jamais son prénom,
Camille, avait les doigts d'une reine.
OR
Écrit par Alphaesia
"Le rêve est une folie passagère, et la folie est un rêve qui n'en finit pas !" Arthur Schopenhauer
Catégorie : Triste
Publié le 10/08/2016
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Je n'oublierai pas ce prénom, Camille, grâce à votre poème splendide et triste à mourir ! Merci de ce partage. | |
jacou |
Bonsoir jacou, merci... C'est une visite là où elle vécu durant les trente dernières années de sa vie qui m'inspira autant. Les lieux sont remplis de souvenirs et d'émotions qui persistent. | |
Alphaesia |
Honte à moi ! Je n'avais pas réalisé que votre poème est un bel hommage à Camille Claudel, pourtant à la relecture...les indices étaient là : "Mais elle a sculpté sa seule existence" ! Je suis passionné par elle, j'ai vu les films qui lui ont été consacrés, lu les biographies, vu les oeuvres, je lui ai consacré un texte même que j'avais posté ici le 3 juin 2014, enfin plutôt à son frère le poète Paul qui l'a lâchement abandonnée... Par ailleurs, sa mère ne lui a jamais rendu visite. Je suis attiré par ces tristes destins qui se perdent dans la nuit... |
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jacou |
Voilà un bel hommage rendu à ce génie injustement oublié durant plus d'un siècle, hélàs, elle n'est pas la seule... | |
banniange-deleted |
Bonjour, Oui, c'est un bel hommage. :-) |
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Iloa Mys |
Quel bel hommage a Camille Claudel et si bien formulé | |
roserose |
Bonjour et merci à vous banniange, Iloa, roserose et jacou ! :-) Je tenais à lui rendre cet hommage, d'une part parce que je suis assez attaché au personnage, et d'autre part parce que j'habite à Avignon non loin de l'hôpital psychiatrique de Montdevergues où elle séjourna jusqu'à son décès. D'ailleurs j'ai visité l'aile où elle vivait (tant bien que mal), que d'émotions ! |
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Alphaesia |
Bonjour Olivier, Superbe hommage à Camille Claudel que j'ai beaucoup aimé lire ! Belle journée ! Mes amitiés Sybilla |
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Sybilla |
Bonjour Sybilla, merci du fond du coeur, c'est vrai que je suis fasciné par cette artiste qui fut vraiment incomprise et maltraitée... Belle journée à vous aussi ! Amitiés Olivier |
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Alphaesia |
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