Te souviens-tu de ce triste conte d'Andersen
Que je te racontais lorsque tu ne dormais pas ?
Et dans tes rêves tu voyais cet ange ici-bas
Venir étreindre la fillette en un doux amen.

Elle avait brûlé sa toute dernière allumette,
Petite lueur d'espoir dans cet horrible froid,
Mon coeur saigne quand je songe à son effroi,
Et mes larmes sont au seuil de mes lunettes.

Fallait-il être le plus sensible des poètes,
Pour narrer ainsi l'essentiel de tout amour ?
Ces cruels desseins qui accablent les jours,
N'entament pas les lueurs des aubes secrètes.

Te souviens-tu de ce conte qui vibre en moi
Encore et encore comme un récit fondamental ?
Depuis ce soir-là j'exècre l'aube et le mal,
Qui emporte les enfants en ces avides voies.

Petite lueur comme une étoile en mon coeur,
Je l'imagine sauvée par quelques bras aimants,
Au lieu d'être emportée vers ces firmaments,
Où siège l'amour ailé dans une autre douceur.

J'y pense quelquefois quand la lune remonte
Au dessus des chaumes dans un élan vertical,
Et quand mes projets sont tristes et bancals
Je m'afflige sur les rives de ce vieux conte.

Rappelle-toi de ce beau livre, bel illustré
Que je rangeais dans mon tiroir tel un Graal,
Chaque récit résonnait en moi tel un récital,
Berçant ma veille après le jour si frustré.

La fillette s'était envolée vers les novas,
Ou dans un jardin inaccessible aux malheurs,
Moi j'essuyais les humidités de mes pleurs,
Devant le coeur noble d'un ange qui s'en va.

OR