Dans le froid doux, j'allais au pas, lèvres gercées
Je frayais un chemin dans la neige glacée
Observant qui venait aux maisons bien chauffées
Surprendre, sur le pas de sa porte, sa fée

Désormais las, j'étais un homme solitaire
Qui n'aimait rien tant que la liberté sur Terre
J'avais pris part à des révoltes solidaires
Tout peuple introduit dans l'Histoire un appel d'air

J'étais un combattant des causes que l'on perd
Sachant que seul gagne l'ado qui devient père...
Mais les vieux baroudeurs ont du plomb dans la tête
Qui lors se soucie du petit bébé qui tette ?

Or ce froid doux réveille un air d'autrefois vif
Quand je courais avec toi me cacher sous l'if
Où nous échangions nos baisers d'amples velours
Flottant dans tes cheveux gorgés de parfums lourds

Alors, la poudre aux joues était un feu de neige
Et je te faisais fondre en tournant mon manège
Nos chevaux n'étaient pas de bois, et leur haleine
Nous chauffait, transis que nous étions sous nos laines

Puis la poudre aux beaux yeux faisait voir mille étoiles
Au delà des flocons s'inscrivait sur la toile
La lettre d'amour du ciel, d'encre sympathique
Qui n'aurait de durée, par les nuits féériques

Enfin le jour venait nous ramasser au sol
Pelotonnés sous la tente et le parasol
Moi, statue blanche, et toi, marbre de même, en pleurs
Car venait le temps des adieux, de grande ampleur

J'ai dû parcourir de nombreux pays givrés
Me faire un métier et trier bon grain d'ivraie
Dans mon for intérieur, pour devenir plus vrai
Je suis ce colis, moi, que je viens te livrer !