L'arbre en moi est battu pas les vents
Il est saule hors sol et sans racines
Ou trop de racines mêlées à trop d'histoires
Il est frêne que rien n'effraie
Pas même la lueur des phares sur la côte d'Adam
Ou bien le chêne étrennant son châle de brume
Au fond de la vallée des trépassés
Patience sous les vents de l'effroi
Est celle confiée à tel ou tel bouleau
Meurtre prémédité des cerisiers sans fleurs
Cent couteaux ondoyés sous les lunes des puits
L'arbre en moi n'est pas un drame d'hommes
Il dessine une force obscure et roide
Il est plus fort mais c'est une faiblesse
De croire qu'il ne peut plier, courbatu
L'ami roseau sait quelque chose de plus
Le drôle d'oiseau sur la branche lui en sait trop
Un oiseau meurt dans les crocs d'un chat vif
Un rythme est dans l'arbre plus tellurique
Comme chant de la Terre que rien n'arrête
Il est des prairies vertes comme les blés
Des chemins dans les terres sans but
La fourche des passions survolées de corbeaux
Pépiant l'infini dont ils se nourrissent
Et sous le ciel hâtant la tempête mentale
La nuit va s'étendre en sa fureur et son meurtre
L'arbre en moi est battu par des vents de néant
Il est saule riverain poussant en bord de berge
Ôté de racine par un rien qui héberge
Ses feuilles parsemées vont dans l'eau ruisselant
Il est frêne et chêne et le cerisier mes seuls frères
Rien n'effraie un homme qui n'a plus que dix sous
Il songe à l'eau blême et à tout ce qui dissout
Aux filles d'avant qui tant de fois l'effrayèrent !
Je n'ai de cesse de durer amis mes arbres
Comme vous dont le sol vacant est mort de l'âme
J'ai poussé dans le bitume à renfort de lames
Il n'est nulle mort qui ne me laisse de marbre
Sauf la mienne en un grand éclat d'un bon fou rire !
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Nature
Publié le 23/10/2021
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Bonsoir Jacou .. Wouahou ! La Nature est Grande Ici .. Les Arbres expriment tant de Choses .. Comme s'ils étaient Couleurs d'un Tableau .. Chacun l'Emotion qui lui appartient, se rattachant à l'Homme qui les aime tant ... Et les Allusions ici et là font Flashes .. BRAVO .. un Régal ! Amitié, LyS .. |
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Lys-Clea |
Merci Claire, entre "béton et bitume" j'aimerais tant être un arbre avec comme amis des vieilles branches lol ! Plus sérieusement, le candélabre salue le ciel avant qu'il ne le délabre, et sous l'abri de tels lambris je veux pour novembre poursuivre ma vie, enviant l'ambre d'un automne mourant hiver... Amitié |
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jacou |
La tempête mentale dans la fureur et le meurtre de la nuit qui s'étend, magnifique ! | |
Edelphe |
Merci Edelphe. La 4ème strophe où je visualise le dernier tableau peint par Van Gogh, le "Champ de blé aux corbeaux" avec son chemin qui forme une fourche parmi les blés, survolé de corbeaux qui pourraient paraître menaçants parce qu'ils sont en escadrille, et le ciel paraissant bas et lourd comme dans le poème baudelairien, est hantée par cette toile dont je connais le contexte : à Auvers-sur-Oise, l'on dit que le peintre se chamailla avec deux jeunes gens, puis qu'il rentra à l'hôtel et, dans la chambre à l'étage où il s'allongea, il s'est tiré une balle dans le coeur avec un révolver qu'il possédait. S'il le possédait, il devait avoir un projet à son propos pour l'utiliser. C'est là que les théories s'échafaudent. Importuns constamment menaçant ou idées personnelles funestes car Vincent était consterné dans ses lettres de rester à la charge matérielle de son frère Théo qui payait la chambre d'hôtel et les toiles et les tubes alors que Théo et son épouse venaient d'être parents et qu'en plus ils invitaient le peintre infortuné de ne rien vendre mais d'explorer l'infini de la peinture à les rejoindre pour vivre tous ensemble sous le même toit à Paris. On peut penser que Vincent Van Gogh qui n'a jamais voulu gêner voulait s'effacer, et comme il était très volontaire il aura pris une décision radicale. C'est une hypothèse. Je m'imagine ici sa tempête mentale, sa fureur intérieure qu'on le prenne pour un raté qui barbouille alors que ses lettres sont éloquentes sur ses convictions assurées d'être utile à la cause picturale et ses amitiés quand il débarque en France qui le portent aussitôt sans le moindre doute vers les impressionnistes dont Pissarro qui éclairera également par la suite Cézanne (et éclairer pour la peinture de Van Gogh est vraiment le mot si l'on compare à ses travaux de Hollande juste avant de venir en France), et comment dans certains cas un tempérament passionné peut recourir à un geste de désemparé et irréfléchi qui néglige l'amour des hommes parce que parfois c'est trop de peine... J'ai pensé aux arbres parce que sur d'autres toiles Vincent Van Gogh se peint cheminant avec son matériel arrimé dans son dos allant vers le motif et qu'il y a un arbre à ses côtés sur quelques toiles, et je me suis dit qu'il faut être fortement enraciné en soi (ce n'est pas vraiment mon cas et j'en fais état ici dès le début) pour avoir d'aussi fortes convictions que celle de ce peintre novateur et parti de rien que j'admire sur tous les plans, en commençant par son art toutefois et son écriture en un français excellent, et le reste psychologique pourrait atténuer en devenant principal mais c'est impossible. Comme Artaud, comme Camille Claudel, comme Hölderlin, comme Nerval, Van Gogh est trop grand et trop sensitif et à la fin bien trop conscient pour ne pas être frappé par une tempête qui le tuera de toutes les manières possibles, le mental avant le corps ou bien fauché d'un coup comme épi de blé dressé dans l'été que foudroie la faux. |
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jacou |
Bonsoir, Ce poème est magnifique j'ai l'impression qu'il fait partie de vous, qu'il retrace un peu votre histoire même si le sujet n'a pas à priori cette vocation. Je suis contente de vous lire mais j'écris beaucoup moins car mes yeux sont capricieux Belle fin de journée à vous |
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roserose |
Bonsoir Roserose, et mille mercis à vous. Oui, il y a de mon histoire dans les dernières strophes, où je m'éloigne des jeux de mots du début et de l'image en moi du tableau de Van Gogh, pour approfondir pourquoi j'ai écrit ceci. Je voulais m'enraciner mais je suis adonné à tous les vents. Ils me font frissonner et m'enlèvent où ils veulent, et ça me va. Je suis un voyageur depuis ma tendre enfance, émerveillé par montagnes et rivages et cartes des atlas et reportages photos à l'étranger des Géo, Nature et du Figaro Magazine... Fonds d'écran, peintures (l'école américaine de l'Hudson River est prodigue), je rêve même sur les illustrations que Windows change sans cesse en allumant mon ordinateur et je clique pour lire où c'est lol ! Mais un arbre dressé me représente affrontant mon destin comme tout un chacun, même si j'ai parfois dû ployer en roseau de La Fontaine ou même de Pascal. Soignez bien vos yeux, chère Roserose, ils sont bien précieux. Belle soirée à vous. |
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jacou |
Whouah ce poème est puissant, profond, Magnifique ! en plus il reprend le thème de l'arbre qui m'est très cher... Je l'ai relu plusieurs fois, toujours avec le même bonheur ! un favori pour moi. |
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Lucyline |
Wahou, permets-moi de garder ta tonalité enthousiaste Lucyline pour infiniment te remercier ! Je suis très heureux de parler d'abord un peu par jeu de ces essences qui sont de joies : les arbres dans ma vie. Dans la froidure d'une aube, ta relecture à laquelle je songeais de ce poème m'a réconforté, car nous écrivons et commentons pour les beaux partages de ce qui dans la création nous est cher. Merci beaucoup pour ton favori aussi ! |
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jacou |
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