J'ai au fond de moi le dur désir de Dürer
La gravure où s'inscrit la noble moue d'un ange
Perdu parmi la science ou bien attendant l'heure
Que Dieu lui serve un goûter avec mets étranges !
J'accompagne ceci de l'adagio pour cordes
Signé Samuel Barber, qui l'âme me déchire
Et me noie aux sphères des étoiles en hordes
Mais il faut manger, rien ne me fera fléchir…
Mélancolique alcool, viens dans mon gosier rose
Faire un glouglou bruyant, et noie la vraie déroute
Qu'ennuie la nuit où s'amenuisent tant de choses
Sauf ma faim…donc je sors chinois, chips, pain, choucroute…
Puis, alors, j'engouffre toute la boustifaille
Songeant que l'univers m'a cueilli d'une mère
Etais-je écueil, avais-je en moi la moindre faille ?
Me sentir vivre est ma potion la plus amère…
Vraiment, manger soulage un être en déshérence
Ma maman me disait : « Il faut manger de tout »
Le pavillon de l'âme est fleuri des errances
Induites dans le cours temporel de nos nous.
Ma maman ma nounou me traitait de nounouille
Miam je me repais de mes choux avec saucisses
Farfouillant, je gribouille et trouve enfin des nouilles
Petit pain, gros chinois, venez dans mes abysses !
L'estomac dans les talons, j'ai le cœur au ventre
Ma tristesse est désastre où je tresse mon astre
Zodiacal, lion déchu, je n'ai plus qu'un seul centre
Mon monde s'étiole en allant à l'épigastre.
« Le Moine en bord de mer » de Friedrich me rassure
« Mélancholia », Dürer y peint la Renaissance
Tiraillée entre le savoir, l'art, un Dieu sûr
Et ce néant de Tout quand longtemps l'on y pense…
Moi, j'achève ma route au fond de ce décor
Table de guingois, chat miaulant après sa mère
Œil glauque, merci mon petit Jésus, mon corps
Mince demeure… Avez-vous l'heure ?... Où va la mer ?...
Hips !
Oups !
https://fr.wikipedia.org/wiki/Melencolia_(Dürer)#/media/File:D%C3%BCrer_Melancholia_I.jpg
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Pensée
Publié le 16/12/2018
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Bonsoir Jacou. J'ai adoré votre poème intimiste, il me semble que dans la premiere partie, vous vous dévoilez avec une grande sincerité, pour finalement nous embarquer avec vous, dans vos pensées, votre monde dans la deuxième partie. Et tout ceci est vraiment réussi, je suis emue par cette impression de recevoir quelque chose de precieux, d'intime..j'irai doucement le mettre en favori tellement le fond et la forme de votre texte sont comme un miroir de vous, une image offerte avec une angoissounette pudique, c'est ce que j'ai ressenti. Merci. | |
Hypothese |
Bonjour Hypothese, Je suis très touché par votre commentaire si plein de sympathie, qui sait accompagner de vos fines lignes écrites le déroulement des vers. Si je me penche sur la mélancolie, c'est qu'elle m'a longuement accompagnée comme un talisman, à sa façon, car je ne puis dire qu'elle m'aie porté malheur, finalement. Un petit mal peut préserver d'un plus grand mal : par exemple, je pense qu'une phobie préserve de la folie (sans être psychologue ceci dit). J'en sors de cette mélancolie, qui s'est longuement manifestée sous la forme de l'agoraphobie (sous la forme de la peur des espaces vides, mais bizarrement pas des foules) et, plus récemment, de la boulimie. L'an dernier, j' ai grossi de 12 ou 13 kilos, et il m'a fallu toute l'année 2018 pour en perdre 10 par régime. Ce mois-ci, je mange comme 4 en ce moment, je crois que la boulimie revient, en relation avec la tristesse de voir finir une belle histoire, voici donc un bilan de fin d'année un peu tristounet, avec une angoissounette, mot très sympathique que je fais mien, qui définit bien une sensation vague, une petite angoisse. La prochaine fois que je parle de moi, ce sera sur le mode drôle, promis juré ! Merci beaucoup Hypothese de prendre le temps de me lire, puis d'écrire, et de déposer dans vos favoris cet écrit, me tenant à coeur. |
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jacou |
J'ai eu l'impression de monter avec tes paroles mélancoliques vers un sommet invisible de pensées puis d'en redescendre par d'autres ...quand la notion de "drôles" ne fait que rajouter d'autres lignes en terme de vives et troublantes émotions et qui finissent par toucher et admettre que le corps, l'esprit et le coeur est une même sphère qui nous domine ... Fort et admirable en sens et en beauté poétique Georges ...comme toujours ! |
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Yuba |
Merci Assia. Les mouvements de l'âme et de l'esprit sont ascendants et descendants. L'esprit cherche l'idéal, l'âme chevillée au corps veut durer sans nul idéal mais avec le seul souci de la vie. D'où ce mouvement dans les deux sens, les deux postulations du texte, la contemplation jamais rassasiée de la création par l'art, le rassasiement toujours à reprendre du gouffre d'estomac, et au milieu le cœur serré écrivant un poème à la fois triste et d'espérance. Car il ne faut après tout jamais se lasser d'être soi. |
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jacou |
Drôle, humoristique et culturel, savant dosage ! | |
CRO-MAGNON |
Ce poème oscille entre mélancolie, humour et flash de cultures qui t'ont ému. En un mot il me fait penser au dimanche ! On mange bien, on parle beaucoup de culture et on rit... En tout cas chez moi ça se passe comme ça. Merci Georges de ces pensées gourmandes et profondes à la fois, un cocktail appréciable ! (Hips encore...) | |
grêle |
Ce poème est beau. Il dévoile votre état d'âme qui oscille entre mélancolie, culture, humour et cette envie de manger qui à certains moments comble un mal être et toutes ces émotions qui en découlent. Merci Georges pour avoir partagé ces pensées avec nous. | |
roserose |
Cro, je te remercie d'avoir apprécié le dosage pas trop compliqué et pas très simple non plus à appliquer. Ma philosophie dans la vie, c'est qu'il faut doser les affects afin de ne pas être enseveli. Et puis, avec une dose d'humour, on peut faire passer à distance les déceptions, et reprendre comme Sisyphe le rocher (Suchard ou Ferrero Roche d'Or ?) à jucher sur l'éternelle montagne. | |
jacou |
Marine, hips en te remerciant, j'ai trop bu d'eau qui enivre aussi bien lol ! Sérieusement, c'est comme un vrai dimanche familial oui, un cocktail de bien des choses, ne manque que la sempiternelle engueulade entre les deux cousins ! (Et re hips ! cette fois, c'est l'excès de café je le jure !) | |
jacou |
Rose, je vous remercie, car en effet manger est très apaisant. Je n'ai pas d'angoisse quand je mange, ou si c'était le cas elle s'enfuyait sur l'instant. Je suis content que vous ayez apprécié ce mélange poétique de vers qui essayaient de tirer à eux mon attention, mais que j'ai guidé à leur port d'attache : le point final. Belle soirée à vous. |
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jacou |
Dans ce mouvement lent, je découvre avec joie et admiration vos poèmes à la beauté certaine, qui me bercent et freinent le rythme effréné de nos vies battantes. Merci à vous! |
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JACQUES ADRIEN |
Merci beaucoup Jacques Adrien pour votre appréciation qui me va droit au cœur, étant un texte plus personnel que d'autres, plus narratifs. | |
jacou |
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