Je cherche le silence et le calme des nuits,
Mais le silence est d'or et ce métal m'ennuie.
La lumière absolue en l'étoile lointaine,
Est-ce un plus sûr asile ? Ou la noire fontaine
De ténèbre infinie apporte-t-elle enfin
À qui fuit l'avanie une sereine fin ?
Est-il un sûr repos où mon âme s'exile ?
Des morts heureux ont-ils leur séjour sur une île ?
Le néant monte au ciel en me noyant l'azur.
Peut-être anéanti, le repos est-il sûr ?

Moi, je ne veux rien tant que l'abîme des astres,
L'oubli n'a rien pour moi qui me semble un désastre.
La harpe séraphique a des sons mélodieux,
Mais tous les paradis me sont trop odieux.
La vanité se tait dans l'absence tenace
Et je cherche le lieu où le temps perd sa place.
Je cherche un sein nocturne effrayant les phénix
Une nuit primordiale avant Ouranos : Nyx !
Tous les êtres vivants s'obstinent et persistent.
Moi je veux l'abandon où plus rien ne résiste.

Que des Moires la trame s'efface et son fil
Soit perdu du Destin, altérant son profil !
Que les feux de l'aurore et ceux du crépuscule
Dissipés dans l'éther dans le chaos basculent !
L'ordre, divin cosmos, à ses lois m'asservit
Et je veux ressaisir ma liberté ravie.
Où donc es-tu déesse du désordre, Éris ?
Toi qui sans cesse veut que l'univers périsse,
Si tu peux imposer le silence et la mort,
Pour toi je fonde un culte et te remets mon sort.

Que ton courroux des corps ranime la jeunesse
Et remontant le temps que le désert renaisse !
Ce faisant, ô Éris, si tu peux, abolis
Épars tous les débris de ce qui m'humilie :

Moi, mon corps, moi, l'esprit,
Inspirant le mépris ;
Moi, mon cœur, moi, mon âme,
Irrités par la flamme.