Le venin de la douleur brûle mon âme,
Et de mes larmes, je viens éteindre la flamme,
O chère muse, qui unissait nos deux cœurs
Et nous faisait chanter d'un si merveilleux chœur !

Chère confidente, triste, mille fois triste
L'homme qui, au seuil de sa dulcinée, assiste
A l'épouvantable et haïssable concert
Mêlant soupirs bestiaux et grincements de fer !

Peut-on feindre avec tant de sincérité ?
Et celle, à l'aube, qui jurait fidélité
En prenant pour témoins christ et tous ses apôtres
Peut-elle avant la nuit se livrer à un autre ?

Finies mes ambitions, mortes mes certitudes,
Brisé mon cœur, et bientôt, l'encrier de verre
Au creux duquel, ma plume, O triste fin d'études,
A puisé l'encre qui peint ces lignes amères !

Muse adorée, nous ne dirons plus de chanson
Et ce baiser est notre ultime union !
Ma main, sur le papier que la lampe illumine,
Ne dansera plus au son de ta voix divine !

Mon amie, pour écrire, il faut de la matière ;
Et mon cœur ne connait matière autre que Carine,
Qui m'enivre comme une fontaine de bière
Et ceint mon las cœur d'une couronne d'épines !