Dix-septième Voyage ( deuxième partie)
- Abu Taieb Ibn Soliman Ibn Othman Ibn Yazid Ibn Zoubeir Ibn Kacim Ibn Taieb le Suave, si tu veux la fortune va à Istanbul, c'est là que tu trouveras un grand trésor.
Abu Taieb se réveilla en sursaut. La voix de l'homme continuait de résonner :
- Si tu veux la fortune , va à Istanbul !
A ce moment précis , une envolée de mouettes circulaire excécuta des mouvements harmonieux et gracieux audessus de sa tête en répétant en choeur :
- Va à Istanbul , va à Istanbul...Istanbul...bul ...bul ...bul...disaient les oiseaux qui savaient de quoi ils parlaient .
- Puisque plus rien ne me rattache à Mogador , pourquoi n'irais-je pas à Istanbul, se dit-il. Un trésor m'y attend.
Le soir même, il retourna à Mogador , pris quelques hardes, fit ses adieux aux mendiants aveugles et accompagné d'un couple de colombes, il quitta Mogador par la porte du Lion.
( Chants des aveugles)
Abu Taieb passa trois ans sur les routes et les pistes avant d'atteindre Istanbul. De Mogador il se dirigea vers la cité d'Azemmour , puis vers le village de Fès. Il a , comme moi, passé la nuit dans le vieux cimetière des chats, et comme moi, il a fait connaissance avec le Meddah d'Alger. Après cela , il est resté trois jours à Kairouan près du tombeau de Sidi Sahab le barbier du prophète. Et puis , ce fut le désert des Bani Kalboun et aussi le pays du Cham, ravagé par les guerres terrifiantes et sanglantes. Et c'est au Caire qu'il assite un égyptologue danois pour nettoyer la momie de Toutencarton.
Ses forces s'amenuisent ainsi de jour en jour, mangeant au hasard , vivant de petits travaux et des générosités qui s'offraient , et c'est à Lataquié qu'il emprunta le vieux bateau Mun Ku Lulu Gudumulu, sous le commandement de l'amiral Gul Al Diar Damur. Le brave commandant avait perdu sa jambe lors de la prise de Chypre. Il a perdu de sa superbe . Il a aussi perdu sa voix.
( Musique turque)
Istanbul enfin.
Abu Taieb le Suave était méconnaissable , hirsute, sale et en guenilles. Il n'avait plus comme bagage que la poussière de l'errance. Ses yeux étaient usés comme les oripeaux des mendiants.
Il pleuvait ce soir-là sur Istanbul et la ville était plongée dans une totale obscurité. Abu Taieb aperçut au loin une faible lumière. C'était une petite et humble mosquée.
- Je vais y passer la nuit , se dit-il , en attendant un lendemain meilleur.
( Bruits-Cris)
Par malchance , ce soir là , le grand musée d'Istanbul fut mis à sac . L'une des plus importantes collections des bijoux royaux disparut , les collections de Suliman le Magnifique et celle de Suliman le Mast. Quelques témoins ont vu les silhouettes des voleurs pénétrer à l'intérieur de la petite mosquée. Ils trouvèrent près du Mihrab un malheureux portant haire et cilice, un étranger...
- C'est lui ! C'est le voleur ! Il n'y a aucun doute , cria un policier . Il le roua de coups pour qu'il avouât un crime qu'il n'avait pas commis.
Le lendemain, on présenta Abu Taieb à l'officier de police , un Turc aux cheveux blonds et crépus.
- Je suis Abu Taieb le Suave , j'étais un homme cousu d'or , le destin m'a coupé les ailes. Mon palais est ruines devenu , mes biens étaient nombreux , mais les plaisirs de ce bas monde m'ont perdu. J'ai basculé de la richesse à l'horreur.
- Qu'es-tu venu faire à Istanbul ? Lui demanda le policier.
- Je suis venu faire fortune à Istanbul, parceque j'ai fait un rêve étrange !
-Quel rêve ? Lui demanda le commissaire amusé.
Abu Taieb lui raconta le rêve de l'Île aux Vents Sauvages.
- Dieu m'est témoin que je dis vrai. J'ai connu les vicissitudes de la vie...mais j'ai obéi à cette voix qui me disait : va à Istanbul après avoir mangé le blé noir de la misère.
- Tu es fou, lui dit le commissaire , tu es fou ! Je vois bien que tu n'es pas le voleur de la collection des bijoux , mais tu es fou de croire en ces histoires de trésor. Moi qui te parle , cela fait dix ans que je vois régulièrement dans mes rêves , un homme qui te ressembles un peu , et qui me dit qu'un trésor m'attend , parait-il là-bas dans le pays du Soleil Couchant. Un trésor est enfoui au bord de la mer.
Retourne chez toi, brave homme, et essaie d'oublier ces rêves inspirés par le chitane. Ce soir le bateau de l'Amiral Gul Al Diar Damur Mutassim , le Kululu Gudumlu Muqtadir , quittera le Bosphore en direction de Mogador. Je te recommanderai.
( Chant de Mogador)
Enfin Mogador, la ville des nuages roses et dont les rues dégagent l'odeur du pain chaud.
Enfin Mogador qui . dans un mirage nacré . Mogador, tel un navire que les vents auraient rejeté sur les rives arganières.
Il retrouva ses amis, les mendiants aux yeux crevés , et leur dit :
- J'ai trouvé Dieu chez vous les pauvres ! Vous êtes les vrais pauvres, parceque vous êtes ensemble !
Abu Taieb décida de vivre avec ses compagnons de misère et pour cela, il commença par construire un abri sur le Rocher des Colombes.
Il creusa lui même les fondations , et stupeur, c'est précisément sous les pieds nus des aveugles que dormaient deux énormes amphores " l'une chargée d'or et l'autre de pierreries " , le trésor dont avait parlé le Turc aux cheveux blonds et crépus.
Écrit par Yuba
Si tu me demandes combien de fois
tu es venu à mon esprit Je reponderai une seule fois ... Car tu ne l'as plus jamais quitté Jalal-Eddine Roumi Catégorie : Citation
Publié le 15/07/2020
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Quelle chance d'avoir eu ce rêve annonciateur d'un grand bonheur. Faire confiance à la vie, mène parfois à un trésor... Merci Yuba | |
creature |
Toujours cette grande sagesse que je lis avec intérêt et curiosité, à laquelle je réfléchis ensuite, et dont j'essaye de nourrir mon âme. Ainsi, l'histoire de Abu Taieb le Suave semble nous dire qu'il faut parfois endurer bien des épreuves avant de trouver son trésor, qu'il n'est pas toujours là où on le croyait caché, et que c'est quand on ne l'attend plus qu'on le découvre. Il en va de même, parfois, dans la vie. Favori, bien-sûr, à la suite des autres étapes. Merci beaucoup pour la poursuite que j'apprécie de faire avec toi par le biais du partage de ce conte. Bises :) |
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Matriochka |
tu transcris des contes passionnants que je lis avec plaisir!bravo...bon courage :)@ | |
romantique |
J'aime beaucoup ce conte comme ceux qui sont déjà parus mais j'avoue ne pas connaitre tous les mots employés même si certains se devinent. Je t'embrasse ma Chère Assia et continue de nous faire rêver. | |
TANGO |